Fondée en 2016, l’association « i‑sea » a pour missions l’éducation, l’information, le dialogue permanent et le recherche scientifique. Leurs buts sont simples : protéger les écosystèmes marins et promouvoir le développement durable. Des objectifs que l’on retrouve au sein de l’Atelier des Jeunes Citoyens et Citoyennes de la Méditerranée (AJCM). Portrait d’une volontaire de l’association.
Anastasia Charitou, 29 ans, est une volontaire de la première heure. Souriante et débordante d’énergie, elle a l’enthousiasme de celles et ceux qui se battent pour une cause à laquelle ils croient dur comme fer. Enseignante spécialisée dans l’éducation environnementale, elle est aujourd’hui la responsable de tous les programmes éducatifs de l’association « i‑sea ».
Toute l’année, elle parcourt les écoles de Grèce pour éduquer écoliers, collégiens et lycéens. « Plus de 50 interventions sont déjà prévues dans des écoles cette année ! », explique-t-elle. « C’est cinq fois plus qu’en 2017 ». Ce qui l’étonne encore aujourd’hui, c’est que « les enfants sont mieux informés que les adultes. Ils ont non seulement la sensibilité de l’âge par rapport à ces questions mais absorbent aussi toute nouvelle connaissance avec enthousiasme ». De quoi être optimiste pour le futur.
Mais si l’éducation des très jeunes est la clé pour changer le futur, le présent reste selon elle dans les mains des adultes : « Nous voulons toucher le plus de personnes possible et être partie prenante dans la mise en place de nouvelles politiques (au niveau étatique) et de leur application. Il faut que nos opinions deviennent majoritaires dans la société. Pour que les gouvernants aient une intention politique réelle de les appliquer ». L’idée du « win-win » (gagnant-gagnant), de solutions écologiques mutuellement bénéfiques pour tous les acteurs concernés est au cœur de la logique d’ i‑sea. « On voit les divers acteurs liés aux fonds marins comme des partenaires, plutôt que des opposants », résume la volontaire.
Il arrive parfois que les pêcheurs ramènent des requins dans leurs filets. Cela pose problème pour l’écosystème marin qui serait profondément affaibli par la disparition de ces grands prédateurs marins. Selon l’association, la moitié des espèces de requins de la Méditerranée est sur la liste rouge des espèces en danger. Pour sensibiliser la profession à ces disparitions, le chemin du dialogue est privilégié : « On les écoute pour qu’ils nous écoutent. On leur donne des infos et on cherche ensemble des solutions qui ne sont pas toujours simples, ni évidentes. Le plus souvent, le levier pour changer les comportements est économique. Par exemple : si avec vos filets vous pêchez un grand requin, parfois il va réussir à détruire les filets. Non seulement votre outil de travail sera abîmé, mais en plus les poissons attrapés vont s’échapper. Il est donc nécessaire pour eux comme pour nous de résoudre le problème », détaille Anastasia Charitou.
Outre les rencontres avec les professionnels de la mer, il est aussi primordial de mobiliser le citoyen lambda. Le nettoyage des plages est l’une des activités récurrentes que l’association organise à travers le pays. « Nettoyer les plages est une activité idéale. Non seulement elle est utile au niveau pratique et au niveau de la recherche avec l’analyse des déchets collectés, mais en plus, elle nous permet de nouer des nouveaux contacts avec de nombreuses personnes », raconte la responsable des programmes éducatifs. Outre les volontaires actifs et leurs amis qui peuvent être plus facilement amenés à participer dans un tel cadre, il y a aussi tous ceux qui vont être plus facilement motivés par une activité de ce genre que par une conférence. Enfin, ces actions de nettoyage mobilisent ceux qui se trouvent sur place par hasard et qui vont se sentir interpellés par l’activité des membres et des volontaires. Le tout est toujours relayé par les médias locaux, donnant une visibilité supplémentaire à la jeune association.
Dans un pays comme la Grèce, la sauvegarde de l’environnement et de la mer tient une place particulière. L’économie du pays est en effet intimement liée à la mer, que ce soit par la pêche ou par le tourisme. « La baisse de la qualité des eaux et des plages détruirait le tourisme », explique Anastasia Charitou. « La baisse de la biodiversité, si elle continue, finira par être désastreuse pour la pêche. La multiplication de solutions novatrices, comme l’écotourisme sont une nécessité ».
L’association a réussi en trois ans à atteindre une présence quasiment institutionnelle dans la société grecque. Elle est aujourd’hui financée par le ministère de l’Ecologie, par la plus grande chaîne de supermarchés du pays, et par plusieurs fondations. Des collaborations scientifiques avec plusieurs universités locales et européennes, dont Aix-Marseille Université ont été mises en place. Dix personnes y travaillent désormais à plein temps. Pour Anastasia, la clé de ces premiers succès est simple : « On a cru en notre pouvoir de changer les choses. On ne change le monde qu’en changeant son propre comportement ».