Le mystérieux militant aux mille talents qui voulait changer le monde

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En Grèce, por­trait d’une récente recrue de l’AJCM, homme de cul­ture aux mille vis­ages et aux mille pro­jets qui entraine avec lui l’engagement sol­idaire de jeunes grecs.

Chanteur de rock, doc­teur en Soci­olo­gie Cul­turelle, musi­cien, directeur sci­en­tifique d’un cen­tre pour deman­deurs d’asile mineurs non accom­pa­g­nés, auteur-com­pos­i­teur, spé­cial­iste des pro­grammes de finance­ment européens pour des pro­jets cul­turels, respon­s­able d’ateliers de préven­tion de la dépen­dance pour les jeunes. Der­rière toutes ces éti­quettes d’une liste qui n’est pas exhaus­tive, un seul homme, Andreas Alm­pa­nis 45 ans, activiste grec mys­térieux et indéfiniss­able qui a tout récem­ment rejoint l’AJCM.

Né et ayant gran­di à Laris­sa, la qua­trième ville de Grèce, il part pour faire des études et y revient 15 ans et trois diplômes plus tard. Entre temps et en par­al­lèle de ses études, il fonde un groupe de rock « I Fovi tou Prigkipa » (les Peurs du Prince) avec trois autres étu­di­ants. Le groupe se crée une petite notoriété et joue à tra­vers le pays. Deux ans plus tard, ils sont signés par le label Vir­gin. L’aventure dur­era pen­dant sept ans, le temps de qua­tre albums. Ce groupe de qua­tre per­son­nes c’est la pre­mière « équipe » d’Andreas et, comme toutes celles qui vont suiv­re, elle pro­duit de l’art, son moyen d’expression par excel­lence.

La fin du groupe mar­que le début de son cur­sus doc­tor­al. En 2008, Andreas devient doc­teur en soci­olo­gie cul­turelle et com­mence une thèse inti­t­ulée « Minorités et exclu­sion sociale ». Il ren­tre à Laris­sa où sa thèse le mène à la prochaine étape de sa vie : il devient directeur sci­en­tifique d’une mai­son de deman­deurs d’asile mineurs et non accom­pa­g­nés gérée par l’ONG Arsis. L’expérience le mar­que. « J’ai com­pris que pour pou­voir vrai­ment soutenir des gens qui sont dans le besoin il faut surtout deux choses : se con­naitre réelle­ment soi-même et ne jamais per­dre de vue que, cir­con­stances de la vie mis­es à part, aucun être humain n’est supérieur aux autres. »

Il intè­gre par la suite le col­lec­tif artis­tique de théâtre musi­cal SMouTh dédié à don­ner des oppor­tu­nités d’éducation et d’expression artis­tique à des jeunes qui n’y auraient pas accès autrement. Tous les ans, le col­lec­tif monte des spec­ta­cles et par­ticipe, grâce à Andreas, à des pro­grammes d’échanges cul­turels européens per­me­t­tant aux jeunes artistes en devenir de l’association non seule­ment de voy­ager mais aus­si de se pro­duire devant et de ren­con­tr­er d’autres jeunes artistes ou artistes aspi­rants venus des qua­tre coins d’Europe.

Mais cela, bien évidem­ment ne lui suf­fit pas. Au fil des ans naîtront donc deux autres pro­jets. Il devient directeur sci­en­tifique de l’atelier de créa­tion de l’OKANA local (Organ­isme pub­lic pour la lutte con­tre l’addiction) et devenu père, il met en place un pro­gramme spé­ciale­ment conçu pour les enfants. Le but est d’utiliser la créa­tion et l’expression artis­tique des enfants pour les pro­téger des ten­ta­tions futures et des dan­gers de la dépen­dance, chose essen­tielle dans un pays comme la Grèce qui souf­fre encore beau­coup de l’héroïne.

Mais cela évidem­ment ne lui suf­fit pas. Bien­tôt, il met aus­si en place MAKE USE col­lec­tif pour jeunes de 16 à 30 ans qui veu­lent « agir en tant que vecteurs de sol­i­dar­ité, pour iden­ti­fi­er et com­pren­dre les prob­lèmes soci­aux et les résoudre ». Comme pour SMouTh il décroche des pro­grammes européens pour per­me­t­tre à ces jeunes de voy­ager à la ren­con­tre d’autres jeunes à tra­vers l’Europe qui parta­gent les mêmes idéaux et trans­for­ment ain­si les bonnes volon­tés locales en actions glob­ales à l’échelle européenne. Et comme il souhaite aus­si s’exprimer, depuis 2016, il crée avec des amis un nou­veau groupe de rock, Birth­day Kicks qui en est aujourd’hui à son deux­ième album.

La source de ses moti­va­tions ? Andreas a du mal à répon­dre claire­ment et sem­ble mal à l’aise. Répon­dre sim­ple­ment sem­ble com­pliqué, un peu comme si il voulait se cacher der­rière des con­cepts flous pour ne pas dévoil­er son grand secret. Comme à con­tre cœur, il admet éventuelle­ment qu’il voudrait juste être un acteur de change­ment, d’un change­ment vers un monde meilleur.

Utopiste ? Le terme sem­ble lui plaire instan­ta­né­ment. Avec une assur­ance retrou­vée, il l’admet volon­tiers. « L’Utopie c’est le but inat­teignable qu’il faut quand même essay­er d’atteindre. Mais l’atteindre ou pas n’est pas réelle­ment impor­tant. Ce qui compte c’est le chemin par­cou­ru ».

Le fait d’être devenu père depuis main­tenant 9 ans l’a‑t-il poussé à se démen­er encore plus pour chang­er le monde dans lequel ses deux fils gran­dis­sent ? Il se pose et réflé­chit : « peut-être… Mais si on demandait à mes enfants ce que fait leur père, ils diraient surtout que papa n’est jamais à la mai­son ». Il est trop occupé à vouloir chang­er le monde.

A Athènes, Pavlos Kapantais
Photo Giannis Floulis

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